Vous l’aurez compris, le constat alarmant hurle l’urgence d’agir. Pas demain, pas dans dix ans, aujourd’hui. Les siècles passés nous ont fait hériter de la culture du viol et ont laissé ce fléau sévir depuis beaucoup trop longtemps. A nous de mettre fin à cette lâcheté qui n’a pas de nom, à ces pratiques mafieuses indignes de notre humanité. Pour toutes ces femmes et ces hommes dont nos silences ont augmenté leurs maux et leurs troubles, nous nous devons, d’une oreille attentive, d’écouter leur récit et leur redonner cette bribe d’humanité que le viol leur a arrachée. Après avoir dessiné les pourtours de la culture du viol, il est temps d’imaginer quelques actions concrètes et faciles à mettre en place pour aider chaque victime à se reconstruire dignement et reprendre le cours de cette vie qui a un jour été brutalement suspendue. 3, 2, 1… Action !
Déconstruire toutes les idées reçues autour de la culture du viol
Aucune action ne sera pleinement bénéfique et utile si la culture du viol continue de régner en maître. Vous l’aurez compris, cette façon de penser n’est que la résultante d’une domination patriarcale qui a proliféré dans l’esprit de nombreux individus à travers le temps. Cette pensée n’a ni fondement logique, ni logique humaine. Elle ne participe qu’à un humanicide, homicide, féminicide et infanticide : elle tue à grandes vitesses et fait beaucoup trop de victimes.
Même si changer sa façon de penser et adhérer à une chose totalement nouvelle, ne se fait pas en un jour, commencer par ne plus considérer les victimes comme coupables est déjà un premier pas. Il est temps de remettre chaque chose à sa place et d’œuvrer en faveur d’une vraie justice : reconnaître enfin les victimes telles quelle. Il n’y a plus de place à la culpabilisation, ou renvoi de fautes sur les victimes. Une écoute attentive, bienveillante et sans couper la parole est déjà une aide inestimable, l’expression d’une empathie et humanité dont il resterait quelques bribes.
Parler, hurler, dénoncer : reprendre sa voix !
Nous avons observé combien être violé·e réduit au silence les victimes et plonge la société dans un silence complice. En brisant cette omerta, on fait reculer la loi du silence, on donne plus de visibilités aux victimes et, ce faisant, on oblige la justice à ouvrir les yeux, les politiques à prendre leur responsabilité.
Parler c’est déjà évoquer ce sujet dans son entourage proche ou lointain pour les informer sur ce qu’est un viol et quelles en sont les répercussions. Une société mieux informée est une société plus à même de se défendre et de se protéger. Le silence a induit à l’impunité des violeurs. La parole doit pouvoir les condamner.
Parler c’est aussi être attentifs à son entourage et ouvrir le dialogue pour lui permettre, en cas de viols ou agressions sexuelles, de pouvoir venir le dénoncer. C’est ouvrir la porte de l’échange verbal pour apaiser le cœur des victimes et s’indigner avec elleux. C’est leur montrer que leur parole n’est plus silenciée mais écoutée.
Parler c’est s’indigner lorsqu’on entend des affaires de viols. C’est gueuler pour mettre la justice et les politiques face à leurs responsabilités. Car gouverner ce n’est pas juste s’asseoir dans un fauteuil, plusieurs heures, à discuter des lois. C’est surtout et avant tout garantir la sécurité et la protection de celleux qui nous ont fait suffisamment confiance en votant pour nous.
Protéger les enfants, première cible des violeurs, c’est préserver notre humanité
Protéger les enfants est essentiel. Ils sont les premières cibles des violeurs car, du fait de leur jeune âge, ielles ne se rendent pas comptent de ce qui leur arrive et leurs paroles est trop souvent mises en cause par les adultes censé·es les protéger.
Le tabou autour de la sexualité est le passeport d’entrée qu’utilisent les violeurs pour commettre leurs méfaits, a fortiori sur des enfants. Qui plus est, ceux-ci seront sujets à une amnésie traumatique donc leur parole ne pourra être libérée qu’après de nombreuses années. Toutes ces années seront des instants de souffrances. Nous devons tout faire pour les éradiquer. Car, en laissant les enfants être de telles proies, on crée des adultes de demain en souffrance, des adultes cabossés, et c’est une partie de l’humanité qu’on met en danger.
Il est donc essentiel que les adultes libèrent la parole à ce sujet-là, en protégeant les enfants. Car, bien souvent, les violeurs peuvent être des personnes en qui les adultes, parents, protecteurs, avaient confiance. Il faut donc permettre aux enfants de dénoncer ces odieux actes en leur donnant la possibilité de s’exprimer, en leur apprenant que nul n’a le droit de toucher à son corps, sans son accord. Oui, le consentement s’apprend.
De façon simple et concrète, il ne faut plus avoir peur de nommer les parties intimes des enfants. De la même manière qu’on nomme leur bouche, leurs genoux ou leurs oreilles, énoncer les mots “vagin” et “pénis” ne devraient pas être problématique. Trop souvent, ce sont nos complexes d’adulte qu’on projette sur nos enfants. Or, pour ces derniers, ces mots ne sont que du vocabulaire anatomique, sans aucune connotation sexuelle. Comment pourrait-il en être autrement puisque la sexualité n’existe pas encore dans leur conscience ?
Ensuite, il s’agit de dire à nos filles et à nos garçons, que personne n’a le droit de les toucher au niveau du pénis, du vagin ou des fesses et personne n’a le droit non plus de leur montrer ou leur demander de toucher son pénis, son vagin ou ses fesses. En disant ces quelques mots, nous disons à l’enfant qu’il y a une barrière, une limite à ne pas franchir sur soi ou sur autrui. Ainsi, dès lors que cette limite est outrepassée, l’enfant aura conscientisé une certaine transgression, même s’il ne sera pas en mesure de la comprendre. Il pourra alors se référer à l’adulte de confiance pour lui dire qu’autrui a franchi certaines limites. Se faisant, nous diminuons considérablement le risque de développer une mémoire traumatique, une amnésie traumatique et nous pouvons permettre une prise en charge rapide et immédiate des violences sexuelles. Nous offrons la possibilité à l’enfant d’être soigné rapidement pour ne pas développer des psychotraumatismes et risquer une vie terrible de souffrances. Nous donnons cette opportunité aux protecteurs de porter plainte au nom de l’enfant contre le/la transgresseur·se et lui permettre d’être enfermé·e. Nous évitons que les adultes en devenir traumatisé·es ne soient de nouveau silencié·es à cause d’un délai de prescription.
Nous protégeons, tout simplement, nos enfants.
Crédit Photo à la une : affiche de la série Sweet/vicious
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