Lallab organise en partenariat avec Amy Tounkara, écrivaine et fondatrice de La femme en papier des ateliers d’écriture mensuels exclusivement réservés aux femmes musulmanes.
Il était important pour nous de créer un espace de bienveillance et de libre parole dans ce climat sexiste, raciste et islamophobe généralisée. L’objectif aussi, à travers les écrits que nous publions, est de mettre en évidence d’un côté la singularité de nos parcours de vie, le fait que LA femme musulmane dont on entend tant parler dans les médias n’existe pas; et d’un autre côté l’universalité de nos récits.
Les ateliers d’écriture ont pour but de créer un espace bienveillant afin de rendre l’écriture accessible à toutes et permettre à chacune de reprendre la narration de son histoire.
C’est une occasion à la fois d’écrire, parce que l’écriture est un exutoire, une affirmation de soi et une possibilité de développer sa créativité. Mais aussi une occasion de partager ses expériences, de libérer sa parole sur des discriminations et de rêver ensemble.
Consigne : Ecrire une récit d’une quête spirituelle où l’héroïne confrontée à une information religieuse qui heurte ses valeurs
Khadija portait fièrement le prénom de la mère des croyants·es. Elle ne pouvait s’empêcher de se sentir proche d’elle. Comme si un lien les unissait, et que ce prénom, transmis siècle après siècle, lui avait été donné à titre de signe, de rappel. Elle portait Allah dans son coeur, et elle essayait de cultiver sa foi en dépit du doute. Car oui, depuis un certain temps, le doute semblait la suivre. Comme une ombre, il se faufilait partout, tout le temps. Il la suivait jusque dans son lit, dans le bus, ou encore dans les toilettes. Le doute était venu, un jour où elle avait discuté avec ses amies. Elles avaient été catégoriques. Elle ne pouvait être ces deux choses à la fois. Elle devait choisir, maintenant, tout de suite, ou sinon, ce serait l’Enfer. Depuis, elle n’avait plus d’amies, mais son compagnon indésirable la suivait constamment. Il était un écran entre Dieu et elle, jusqu’à l’empêcher de prier et d’adorer son Créateur. Elle avait toujours cru qu’Allah était accessible à qui L’invoquait, qui Le priait, et qui reconnaissait Son immensité. Aujourd’hui, elle avait le sentiment de s’être vu refusé l’entrée devant les portes de la ummah . 1 Il en a fallu des heures, des jours, des semaines pour que le doute la quitte. Le jour de ses 25 ans, il s’en est allé, soudainement. Après une nuit à pleurer, elle avait compris. À l’heure du fajr, après avoir fait ses ablutions, elle décida de retrouver son Seigneur. Comme pour marquer une réconciliation, elle passa des heures à lui parler. Une fois ce rendez-vous terminé, elle alla s’asseoir sur son lit. Elle avait trouvé une réponse à ce dilemme sans fin : elle était à la fois musulmane et lesbienne. Khadija soupira, et soulagée elle s’allongea en se répétant qu’elle n’avait pas à prouver cette possibilité puisque sa seule existence suffisait à le faire.
M.
Crédit photo : Lallab
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