Afro !, F(l)ammes et Reporter Citoyen : trois façons de faire “entendre les voix de la France”

par | 28 octobre 2017 | (Dé)construction

Reporter Citoyen a organisé samedi 21 octobre à la Maison des métallos une rencontre-débat autour du thème “Entendre les voix de la France”. L’occasion de faire discuter Rokhaya Diallo de l’exposition Afro !, Sabah Rahmani, Moussa Wagué et Odile Kitenge de Reporter Citoyen ainsi que Ahmed Madani, Anissa Kaki et Yasmina Ghemzi du spectacle F(l)ammes. Tou·tes ont livré ce qu’évoquait pour elles et eux le thème “Entendre les voix de la France”. 

 

Montrer la diversité de la France

 

Pour les intervenant·es, « Entendre les voix de la France » c’est surtout permettre aux voix trop longtemps tues de s’exprimer. Chaque intervenant·e, à sa manière, fait en sorte qu’on « écoute l’océan qu’est la France et pas uniquement les petites gouttes qui dirigent » pour reprendre les mots de Yasmina Ghemzi.

Sabah Rahmani, formatrice à Reporter Citoyen rappelle qu’« il faut parler de voix et de voies parce qu’il n’y a pas qu’un seul modèle de société, pas qu’une seule direction ». Partant du constat que 70% des journalistes sont issus de milieux favorisés, les fondateur.rices de Reporteur Citoyen œuvrent depuis 2009 pour donner la parole à celles et ceux qui ne l’ont pas habituellement et ouvrir la porte des médias aux jeunes des quartiers populaires qui souhaitent devenir journalistes. Sur une période de trois ans, des jeunes sont formé·es gratuitement au journalisme multimédia afin de pouvoir faire porter leur voix médiatiquement. « Les vécus et histoires mises bout-à-bout représentent cette France cosmopolite » explique Odile Kitenge de Reporter Citoyen.

Une France cosmopolite jusqu’au bout des cheveux. « Paris est la ville d’Inès de la Fressange et de Caroline de Maigret, mais aussi d’Imany et d’Aissa Maiga » a déclaré Rokhaya Diallo lors du vernissage de son exposition Afro ! le 11 octobre. Grâce à ce projet lancé il y a trois ans avec Brigitte Sombié, Rokhaya Diallo espère « représenter une France afrodescendante qui assume son cheveu naturel »

Rokhaya Diallo et Brigitte Sombié ont publié un livre, Afro!, de près de 300 pages, rassemblant les clichés des 110 Parisien·nes pris·es en photo avec leurs cheveux crépus, bouclés, tressés ou encore leurs dreadlocks. La force du livre et de l’exposition est de mettre en avant des personnalités connues comme Christiane Taubira ou Leïla Slimani et des personnes inconnues du grand public.

 

Crédit photo : Plumelle

 

Se réapproprier son histoire

 

« Souvent les gens que nous sommes sont racontés par d’autres » lance Rokhaya Diallo. Pour Yasmina Ghemzi de F(l)ammes, « dire « je suis Française » c’est un combat qui prend du temps parce qu’on doit se construire du côté historique, théorique et personnel pour pouvoir répondre à ceux qui nous contredisent avec un esprit paternaliste post-colonial. » Pour elle, « parler permet de sortir de la torpeur sociale pour commencer à agir ».

Cette dimension politique se retrouve aussi dans les récits de personnes photographiées par Brigitte Sombié pour Afro !. « Porter mes cheveux comme ça j’appelle de la résistance passive. Quand je vois le nombre de gens qui souffrent dans ce pays parce qu’ils sont ligotés par les codes, ça m’attriste. Tu es ce que tu es et tu trouveras toujours quelqu’un pour t’aimer pour ce que tu es » déclare Ryadh Sallem, un consultant et sportif de haut niveau qui porte des dreadlocks.

 

Présentation de la pièce F(l)ammes. Captation et montage : Bastien Choquet
 

Relier les sensibilités

 

Pour Ahmed Madani, il était important de créer une rencontre à travers son spectacle. Une rencontre entre des personnes qui ont l’habitude de fréquenter les théâtres et d’autres qui sont silencié·es dans les lieux artistiques. « Ce qui se passe à l’intérieur d’un être-humain le relie aux autres » grâce à une « démarche artistique qui génère aussitôt de l’empathie » explique le metteur en scène.

Le spectacle s’articule autour de la féminité et permet d’aborder des sujets difficiles. Pour le metteur en scène : « en livrant la fragilité, elles livrent la puissance ». « Elles montrent quelque chose que chaque femme a en elle mais qu’elle contient à cause des mécanismes de domination » poursuit Ahmed Madani.

« Ecouter les histoires autres ça a résonné en moi. Le fait d’être avec les filles ça m’a réparée parce que j’ai appris à assumer » confie Anissa Kaki, une des comédiennes non-professionnelles de F(l)ammes. Pour Sabah Rahmani de Reporter Citoyen « l’expression est aussi une guérison, ça a un côté cathartique. »

 

A découvrir :

 

Le spectacle F(l)ammes jusqu’au 29 octobre

L’exposition Afro! jusqu’au 29 octobre

Reporter Citoyen 

 

Crédit photo à la une :  François Louis Athénas

 

 

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