Le samedi 1er et le dimanche 2 octobre a eu lieu le LallabDay #13, notre grand weekend de rencontres et de formation entre Lallas, les bénévoles de Lallab. C’est avec beaucoup d’émotions qu’Assma, nouvelle Lalla, nous confie ses ressentis sur ce weekend. Après avoir secoué toute la salle avec son témoignage, Assma revient ici sur ses rencontres, ses échanges et ses prises de parole. Derrière son « je » se cache un « nous », un « nous » d’une centaine de bénévoles « différentes, spéciales et uniques » dont les chemins se sont croisés chez Lallab afin de faire entendre les voix des femmes musulmanes.
Je suis rentrée, on m’a dit : « Tu fais partie de la famille, que tu le veuilles ou non. »
Crédit photo : @dalal.tmr
Franchement, en tant que nouvelle… Moi, je n’aime pas la notion d’intégration. Je la trouve obsolète, dans tous les aspects, et c’est quelque chose de très dur aussi quand tu es une personne introvertie. Là, clairement je n’ai pas eu besoin de m’intégrer. J’avais l’impression que je connaissais les gens depuis très longtemps. Je suis rentrée, on m’a dit : « Tu fais partie de la famille, que tu le veuilles ou non. » C’était très fluide.
Dès que je suis rentrée, même s’il y avait des groupes qui s’étaient formés, une personne est venue vers moi pour me mettre à l’aise, pour essayer de m’intégrer. Et ça m’a grave touchée, parce que j’ai l’habitude du monde associatif, j’ai l’habitude de soirées, d’après-midis, d’évènements. Et à chaque fois, je reste à ma place et personne ne va m’intégrer, et ce n’est pas que moi d’ailleurs. Et là, j’ai trouvé ça tellement humain, vraiment je mets un point d’honneur, c’était tellement humain de sa part de venir pour me rassurer.
Et quand je vais au Lallab Day, « surprise, la sororité existe ! »
Mais s’il y a surtout une chose qui a ouvert mon coeur, c’est la sororité. Parce qu’en fait, mon cœur était un peu fermé, ou plutôt mon cœur se protégeait face à d’éventuelles mauvaises expériences de vie, face à la solidarité féminine, parce que j’ai eu de mauvaises expériences. Et je pensais au bout d’un moment que la solidarité féminine n’existait pas. Quand je vois des femmes dans la rue, qui sont contre le port du hijab, du foulard, ça me choque, parce que du coup elles sont anti-féministes. Et le fait de ne pas avoir de soutien de la part des femmes m’a beaucoup blessée. Et quand je vais chez Lallab, quand je vais au Lallab Day, « surprise, la sororité existe ! ». Et ce n’est pas un monde bisounours, ça se travaille. Il y a de la confiance, il y a de l’amour, il y a de la bienveillance, il y a beaucoup d’écoute. Je ne m’attendais pas à ce qu’on m’écoute autant, parce que déjà en tant que femme tu es peu écoutée, en tant que française musulmane tu es peu écoutée sur des sujets qui te concernent. Du coup, avoir un espace d’écoute, c’était top, c’était incroyable. Franchement, c’était une révélation pour moi le Lallab Day.
Crédit photo : @dalal.tmr
J’ai senti un espace tellement bienveillant, un espace tellement empli d’amour et de compréhension.
Chez Lallab, je m’attendais à un truc très pro mais pas avec autant d’amour, un truc très rationnel, très détaché de l’humain. Je m’attendais à ce que l’on travaille ensemble sur des projets, mais sans énormément d’amour entre nous. Que l’on soit juste des co-équipières, pas une famille. Du coup, je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant d’émotions. Me dire que je vais venir pour pleurer, je ne pensais pas !
Ça a été très fort en émotions, parce que j’ai partagé, durant l’atelier de Hanane Karimi, mon témoignage face à ma santé mentale concernant les discriminations liées à l’islamophobie, liées au port de mon foulard, au fait qu’on rabaisse ma religion sans cesse. C’était un peu dur, ce n’est pas que c’était dur à partager, parce que j’ai déjà eu l’habitude de partager mon vécu. J’ai même été interviewée par AJ+, par d’autres journaux de presse, et je n’ai pas pleuré. Mais en fait, j’ai senti un espace tellement bienveillant, un espace tellement empli d’amour et de compréhension. Je ne pensais pas pleurer et me dire que je me suis lâchée comme si je parlais à une amie proche… Et c’est une journée vraiment que je n’oublierai pas !
Crédit photo : @dalal.tmr
J’ai grave aimé parce qu’on est toutes différentes.
Sur le plan inclusif, j’ai grave aimé parce qu’on est toutes différentes, ne serait-ce que pour celles qui portent le foulard, on est déjà toutes différentes. Ce n’est pas une femme, c’est les femmes, et toutes les femmes sont différentes, et ça tu le ressens direct. Dès que tu rentres chez Lallab, tu sens que ce n’est pas un truc homogène. On est toutes spéciales, on est toutes uniques. Et ça forme ensuite un groupe homogène par rapport à notre vision humaine des choses. Nos principes, nos valeurs sont les mêmes. Et malgré ça, on apprend beaucoup l’une de l’autre. Moi, j’ai beaucoup appris dans les échanges que j’ai eus avec toutes les Lallas. Ça m’a juste renforcée dans ma vision du monde. Ça m’a donné confiance en moi : « Ah ouais t’es pas seule quoi ! Il n’y a pas que toi qui penses comme ça. Donc aie confiance en tes projets aussi. » Bizarrement, ça m’a donné confiance en moi-même et en mes projets futurs, que j’ai envie de partager aussi avec Lallab.
Les ateliers, ça se voit qu’ils étaient pensés. Moi, je pensais à des ateliers type brise-glaces pour qu’on apprenne à se connaître. Mais non, c’étaient vraiment des ateliers limite pro. Et ces ateliers m’ont enrichie spirituellement, m’ont enrichie citoyennement parlant. Je me sens encore plus comme une citoyenne française. Et ça, c’est très important de le soulever, parce que Lallab ce n’est pas une association qui est là et qui ne parle que de spiritualité et qui essaye de créer une identité spirituelle à l’encontre d’une identité française et républicaine. C’est vraiment un mélange des deux. Et ça, ça m’a beaucoup plu et je suis ressortie française et musulmane.
Je suis dans le Lallab Agora (Le Lallab Agora est un atelier mensuel unique en son genre pour démocratiser l’accessibilité, la transmission et la production des savoirs en rendant la parole aux principales concernées). Et en tout cas, on me l’a bien vendu, donc j’ai trop hâte, j’ai trop hâte de donner cette énergie à une bonne cause.
Crédit photo : @dalal.tmr
Chez Lallab, tu vis tellement ton identité. Et ça, c’est très rare, être dans un endroit où on te dit que tu peux être toi-même.
J’étais à fond dans une identité étudiante, et j’oubliais que j’étais une femme. Du coup, j’ai voulu un peu plus me ré-approprier ou m’approprier, ça dépend du cours de mon histoire, cette identité de femme, et je pense qu’il n’y a pas mieux que Lallab pour ça.
Chez Lallab, tu vis tellement ton identité. Même si je faisais partie d’une association étudiante avant, il y avait des choses qu’on ne faisait pas, parce qu’on était une association étudiante, donc en contrat avec l’État, avec la France. Donc on ne pouvait pas se permettre de faire un truc spirituel, sinon on nous taclait de prosélytisme. Alors qu’avec Lallab, tu peux dire « inchaallah » tranquille. Tu peux enrichir ta spiritualité, sans qu’on te tague de prosélytisme. Et en fait, tu es toi-même. Et ça, c’est très rare, d’être dans un endroit où on te dit que tu peux être toi-même. Et je pense que si Lallab est si populaire aussi aujourd’hui, et si elle est respectée et aimée, je pense c’est parce que c’est un endroit où il y a un environnement safe, qui te dit : « Tu peux être toi-même. » Et quand tu es toi-même, et bien en fait tu as un panel de motivations, d’idées de projets, d’ambitions, qui naissent en toi, parce que tu peux être toi-même, et du coup tu donnes encore plus à fond.
Crédit photo image à la une : @dalal.tmr