En premier lieu, nous souhaitons envoyer nos pensées et témoigner de notre solidarité à tous les musulman.es visé.es et impacté.es dans leur santé mentale, physique, dans leur vie, leur quotidien par les fermetures successives de structures ou d’écoles musulmanes, d’associations de solidarité et de lutte contre l’islamophobie ainsi que de lieux de cultes. Nous sommes ensemble et nous ne vous oublions pas.
Ces dernières semaines, et plus largement ces derniers mois, ont été d’une violence incessante pour de nombreux.ses musulman.es en France suite à la fermeture arbitraire de structures, d’écoles musulmanes, d’associations de lutte contre l’islamophobie et de mosquées, renforçant alors la menace dirigée vers la communauté musulmane et le danger qui pèse sur nos droits.
Nous ne reviendrons pas sur le constat amer que nous avions déjà dressé l’an dernier dans notre communiqué sur la radicalisation islamophobe du gouvernement. Ces fermetures, expliquées notamment par des raisons administratives abusives, interviennent dans la continuité de l’acharnement islamophobe et liberticide enclenché par la dissolution du CCIF en septembre 2020, dissolution discrètement validée par le Conseil d’Etat en septembre 2021, « plaçant une épée de Damoclès au-dessus des associations qui ont pour objet la défense des droits et libertés » comme s’en indigne la Ligue des Droits de l’Homme.
En tant qu’association féministe et antiraciste qui défend les droits et fait entendre les voix des femmes musulmanes, nous souhaitons attirer votre attention sur ces évènements récents, et les menaces de futures dissolutions, qui montrent une volonté de briser toute organisation de structures musulmanes, toute dénonciation de l’islamophobie et plus largement du racisme et nous alertent tant ils représentent un risque considérable pour notre démocratie, notre liberté d’expression et nos droits les plus fondamentaux.
Que cela concerne la dissolution de la Coordination contre le racisme et l’islamophobie, une association d’aide jurididique, la fermeture de la maison d’édition Nawa ou la menace de fermeture de l’institut Ibn Badis, une école privée, exclure des centaines de musulman.e.s de ces espaces-là, sur des accusations souvent infondées et injustifiées, est un acte délibéremment dangereux qui pose les bases d’une société qui marginalise les musulman.es, criminalise leurs pratiques et leur refuse leurs droits en tant que citoyen.nes. Ces lieux de culte, d’éducation, d’association sont, avant tout pour nous, des lieux de vie, de rencontre, de transmission, de partage, d’apprentissage et de solidarité. Nous en priver est profondément déshumanisant et une atteinte considérable à nos individualités ainsi qu’à nos libertés communes et fondamentales.
Comme le rappelle et le dénonce sans concession l’Union Juive Française pour la Paix, dans son communiqué « Après la dissolution de la CRI, plus que jamais, résister à la fascisation du pouvoir« , « il faut rappeler que ces associations n’ont jamais donné lieu à une inculpation de leurs militants par la Justice. Aucune de leurs actions n’a jamais fait l’objet d’une condamnation, et pour cause ! Le pouvoir court-circuite la Justice en employant une loi qui a été faite, dans les années 1930 pour dissoudre des organisations fascistes, très violentes dont l’objectif était l’instauration d’un régime de dictature. »
Ces dissolutions et fermetures administratives se déroulent également dans une relative indifférence (en dehors des milieux antiracistes et de défense des droits) et un silence glaçant des médias grand public qui ne font que renforcer les sentiments d’isolement et d’injustice.
Nous tenions également à apporter notre soutien au Conseil de l’Europe qui a lancé, il y a quelques semaines, une campagne de lutte contre l’islamophobie et le sexisme en célébrant les femmes musulmanes qui portent le foulard. Le gouvernement français a demandé et obtenu le retrait de cette campagne. Il aura suffi de quelques heures à la fachosphère, criant aux loups dès qu’elle en a l’occasion, pour faire pression sur le gouvernement français.
Le gouvernement de Macron et l’extrême droite jouent, une fois encore, la même partition, celle de notre exclusion de l’humanité en tant que femmes musulmanes. Alors que certain.es ministres crient à la “cancel culture” sur tous les plateaux (sans crainte du paradoxe), voilà que le gouvernement empêche la diffusion d’une campagne qui présente les femmes portant le foulard comme des personnes libres de leur choix. Le retrait de cette campagne est une entorse non négligeable à la liberté d’expression qui s’inscrit, sans grande surprise mais à notre grand désarroi, dans le continuum de violences et d’intimidations qui visent les musulman.e.s depuis des années.
Crédit photo : photo cropée de Ismail Zaidy, @l4artiste
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